LE DÉFI DU THÉISTE SCEPTIQUE
LE DÉFI DU THÉISTE SCEPTIQUE
Mercredi 12 février 2025
Semaine 7 : Le problème du mal
Thème
général : L'amour et la justice de Dieu
Texte à méditer :
« Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne
sont pas mes voies, dit l’Éternel. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la
terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, et mes pensées
au-dessus de vos pensées » (Ésaïe
55:8-9).
Nous éprouvons
tous une aversion profonde pour l’incertitude et les questions laissées sans
réponse. Nul ne le sait mieux que les chercheurs, pour qui l’inachèvement d’une problématique peut devenir une
obsession. Plongée dans la résolution de problèmes scientifiques
d’une grande complexité, j’en fais moi-même l’expérience : l’absence de
solution me tient parfois éveillée, rendant chaque nuit un combat contre
l’inconnu.
Le problème
du mal est d’une grande complexité. Ce que nous souhaiterions observer,
c’est une relation de cause à effet claire et implacable : si l’on est
bon, on est protégé du mal ; si l’on est mauvais, on subit les conséquences de
ses actes. Or, la réalité qui nous entoure est bien plus nuancée. Les méchants
prospèrent en toute impunité, tandis que les innocents souffrent. Dans notre
méditation d’hier, nous avons constaté les limites de nos explications face au
problème du mal et reconnu que bien des aspects de la souffrance demeurent
voilés à notre compréhension. Toutefois, l’absence de réponse immédiate ne
saurait être interprétée comme une absence de dessein divin.
Aujourd’hui, nous
nous penchons sur une approche qui nous exhorte à une foi empreinte d’humilité
et de confiance : le théisme sceptique.
Cette posture ne remet pas en cause l’existence d’un plan divin, mais reconnaît
que certaines de ses raisons nous échappent. Ainsi, au lieu d’exiger des
explications à tout prix, elle choisit de s’appuyer sur la sagesse de Dieu,
convaincue que Sa justice et Son amour transcendent notre entendement limité.
Pourquoi le
mal persiste-t-il alors que Dieu est juste et bon ? Cette question a hanté des
générations de croyants et servi d’argument aux athées. Nous voudrions voir une
justice immédiate : que les bons soient récompensés, que les méchants soient
punis. Mais ce n'est pas ce que nous observons.
Faut-il en conclure que Dieu est absent ou indifférent ?
1. Le cri du psalmiste : "À quoi bon être fidèle ?"
Le Psaume
73 exprime parfaitement ce dilemme. Asaph, son auteur, observe que les méchants
prospèrent alors que les justes souffrent. Il est troublé, presque découragé :
« J’ai
failli trébucher, (…) car je
portais envie aux insensés, en voyant le bonheur des méchants. (…)
Ils ne sont point dans la souffrance comme les autres hommes, (…) ils
multiplient les actes de violence » (Psaume 73:2-8). Comme nous, Asaph cherche
une explication logique, une justice immédiate. Pourquoi Dieu permet-il cela ?
Mais sa
perspective change lorsqu'il entre dans le sanctuaire : « J’ai réfléchi pour
comprendre, la difficulté fut grande à mes yeux, jusqu’à
ce que j’aie pénétré dans les sanctuaires de Dieu et que j’aie pris
garde au sort final des méchants » (Psaume 73:16-17). Il comprend alors que la justice divine ne s’arrête pas à l’instant présent.
Ce que nous voyons aujourd’hui n’est qu’une partie de l’histoire.
2. Le pari du théiste sceptique
Le théiste
sceptique n’est pas celui qui doute de Dieu, mais celui qui reconnaît que la
sagesse divine dépasse la compréhension humaine. Il ne dit pas que Dieu n’a pas
de raison d’agir ainsi, mais que nous ne pouvons pas toujours la saisir. Le
concept est sérieusement étudié en philosophie et en théologie,
en particulier dans les débats sur l’existence de Dieu et la question du mal.
Alvin
Plantinga, un philosophe chrétien renommé, a développé des arguments qui s’en
rapprochent, notamment avec sa défense du libre arbitre comme explication du
mal. Stephen Wykstra est un philosophe qui a formulé ce qu’on appelle
l’argument du CORNEA (Condition Of Reasonable Epistemic Access), qui soutient
que notre incapacité à voir une bonne raison au mal ne signifie pas qu’il n’y
en a pas. Le théisme sceptique repose sur plusieurs idées fondamentales :
a) L’incompréhensibilité partielle de Dieu : l’homme est un être fini et limité dans
sa perception du monde. Dieu,
en tant qu’Être infini, agit selon une sagesse qui nous dépasse.
Ainsi, ce que nous percevons comme de l’injustice ou de l’absence divine peut
être en réalité une partie d’un dessein plus vaste et bienveillant que nous ne
pouvons pas encore saisir.
b) Le fait que nous ne comprenons pas une chose ne prouve pas qu’elle est
fausse : ce n’est pas parce que nous ne voyons pas une raison valable pour laquelle Dieu permet la
souffrance que cette raison n’existe
pas. Illustration : avant la découverte des microbes,
personne ne pouvait les voir, mais cela ne signifiait pas qu’ils n’existaient
pas.
c) Dieu a peut-être des raisons morales suffisantes pour permettre le mal :
le mal et la souffrance peuvent être des
éléments d'un plan plus grand que
nous ne pouvons pas discerner immédiatement. Exemple biblique : L’histoire de Joseph
vendu par ses frères (Genèse 50:20) : ce qui semblait être un mal a servi un
dessein supérieur.
d) Un appel à l’humilité et à la confiance : plutôt que
d’exiger des explications immédiates, le croyant
est appelé à faire confiance à Dieu, même dans l’incertitude. Cela
ne signifie pas cesser de réfléchir, mais reconnaître que
certaines réalités échappent à notre compréhension actuelle.
3. Job, un théiste sceptique malgré lui
Job
souffrait sans comprendre pourquoi. Il réclamait des explications, et ses amis
tentaient de justifier son malheur par une logique simpliste : "Si tu souffres, c’est que tu as péché."
Job savait pertinemment que ce n’était pas le cas. Lorsque Dieu intervint, Il
posa à Job et à ses amis théistes soixante-dix-sept (77) questions, mettant
ainsi en évidence les limites de leur savoir, y compris sur le monde physique
qui les entourait. S’ils étaient incapables de répondre à ces interrogations,
comment pouvaient-ils prétendre résoudre les grandes questions existentielles ?
Le théiste sceptique adopte la même humilité que Job : il croit que Dieu a un
plan, mais il accepte que ce plan ne lui soit pas toujours accessible.
Faut-il se contenter de l’ignorance ?
Certains
diraient que cette posture est une manière d’échapper au problème, d’accepter
l’ignorance au lieu de chercher des réponses. Ce n’est pas un appel à l’aveuglement,
mais à une humilité intellectuelle face à un Dieu infiniment plus sage que
nous. Il ne s’agit donc pas d’un refus d’expliquer le mal, mais d’un appel à faire confiance à Dieu, tout en continuant à réfléchir,
méditer et chercher à mieux comprendre Sa volonté. La Bible
elle-même nous invite à chercher la sagesse, mais aussi à faire confiance quand
la compréhension nous échappe (Deut. 29:29 ; Prov. 3:5).
L’énigme
demeure entière : la question fondamentale reste sans réponse. Pourquoi le mal
et la souffrance persistent-ils ? Nous avons parfois tendance à négliger trop
rapidement la conclusion du livre de Job, car elle semble trop belle. Dans ses
derniers versets, il est question de restauration.
Job se met au service de ses amis,
intercède en leur faveur, et c’est dans cet élan qu’il retrouve son intégrité. Replacée
dans le contexte du combat universel entre le bien et le mal, la notion de
rédemption et de restauration ultime prend tout son sens. Le christianisme
pratique s’attarde moins sur les réponses aux grandes questions métaphysiques
qui nous échapperont toujours et se concentre davantage sur l’œuvre de
restauration et, in fine, sur la rédemption.
Asaph a
trouvé la paix dans la présence de Dieu. Job a trouvé l’humilité dans
le mystère divin. Et nous, où cherchons-nous nos réponses ?
Seigneur, donne-moi une foi qui ne dépend pas de mon intelligence limitée, mais de Ta sagesse infinie. Apprends-moi à Te faire confiance, même quand je ne comprends pas tout. Amen.
Bonne journée sous l’aile bienveillante de l’Éternel
!
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